Samedi 28 Octobre, Place Jean Macé, 14 H
Années après années, gouvernements après gouvernements, les familles des victimes des crimes racistes ou sécuritaires n’ont eu de cesse de dénoncer les meurtres et les violences des forces de l’ordre ou des agents pénitentiaires. Les différentes organisations des quartiers populaires, recensent à ne plus compter les listes choquantes de morts résultant de passages à tabac, de tirs à vue, de gaz lacrymogènes, d’asphyxie et de clés d’étranglements. Au fil des décennies, le nombre de personnes tuées ou mutilées, perpétrés dans la rue ou en détention, se comptent par milliers, (plus de 2250 morts de 1973 à 2022 dcd aux mains de la police – à multiplier par 5 pour les morts suspects en détention) et ce pendant que l’État se mure dans un silence coupable (1). Chiffres AVCS
En dépit des efforts constants pour porter l’intérêt de la cause jusqu’aux lieux forts des grandes juridictions, la ferveur de notre lutte se voit à chaque fois contrecarrée par les décisions bienveillantes des tribunaux. Pas un mois, pas une semaine, sans qu’une nouvelle, une actualité ne vienne ressusciter une triste réalité des décisions de justice à l’égard des agents de l’État mis en cause. Pas une semaine, sans qu’une série de drames, de meurtres ou de violences distillées dans une quasi-
passivité, qualifiées pudiquement de « dérapages », d’« accidents » ou de « bavures », ne meurtrissent une famille.
Le 27 juin 2023, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin affirmait sans risque d’extravagance devant l’Assemblée nationale « qu’il y a eu moins de tirs et (…) moins de cas mortels qu’avant 2017 » : c’est un mensonge.
Depuis 2017 les policiers ont tué 4 fois plus de personnes pour refus d’obtempérer en 5 ans que lors des 20 dernières années. En cause : l’article 435-1. Mais bien avant, une succession de lois, sur fond de surenchère sécuritaire, n’a cessé de grossir le catalogue des mesures légalisant les tirs à vue. Nahel et des dizaines d’autres victimes ont payé de leur vie. Cette réalité dramatique, doit nous interpeller sur ce pouvoir du droit à « faire mourir » en toute légalité, démenti par la convention international de l’ONU du “droit à la vie de 1966”, que la France et d’autres pays de l’union, pourtant signataires violent continuellement, sans faire la démonstration objective de la nécessité du recours à la force, que l’article de la convention sus-cité pourtant oblige.
Malgré les condamnations internationales, le déni a atteint un degré encore jamais égalé.. C’est ainsi que nous sommes fondés à penser « que la lutte pour la vérité et la préservation de la vie, prime plus que tout, quel qu’en soit le prix ». Quitte à conduire des actions pendant des mois, voire pendant des années devant chaque palais de justice, à chaque procès des meurtriers voués à l’indulgence. Ce mouvement initié et dirigé par les familles des victimes, témoin de l’échec du système judiciaire face au pouvoir répressif. Un système incapable de poursuivre et de condamner les responsables de la mort
de leurs proches depuis plus de quarante ans.
Aussi, nous nous devons de prendre les choses en main. Unissons nos forces et mettons en œuvre des stratégies pour obliger l’État à rendre justice. Nous invitons chacun.e et tous les acteurs associatifs, syndicaux et politiques à soutenir et enrichir la voie de la désescalade et contre le déni de justice, à partir des premières revendications suivantes :
1) Nous demandons à ce que des directives fermes soient données aux Procureurs afin de ne plus classer systématiquement les affaires de meurtres, de violences policières ou pénitentiaires, lorsque des éléments probants se révélant à sa disposition leurs permettent de poursuivre.
2) Nous demandons l’accès au dossier dès le début de l’instruction, et que l’on cesse de cantonner les familles de victimes au strapontin des parties civiles.
3) Nous demandons la possibilité de faire appel de la sanction pénale quand elle nous semble la négation de l’atteinte qui nous a été faite.
4) Que la justice Française prenne en compte l’attente des victimes et reconnaisse la culpabilité des auteurs de meurtres ou de violences, et agissent en conséquence, pour prévenir tout nouveau crime ou violences à caractère raciste ou sécuritaire.
5) Nous demandons l’abrogation de l’article L435–1 du code de la sécurité intérieur, fondement meurtrier de trop nombreuses victimes.
6) Nous demandons que les crimes et les violences volontaires soient considérées comme circonstance aggravante, lorsqu’elles ont été commises en raison de l’origine nationale des victimes, ou ont été « précédées, accompagnées ou suivies de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature portant atteinte à l’honneur ou à la considération de la victime de son appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une race ou une religion déterminée.
7) Le lancement des campagnes d’information et de sensibilisation de l’opinion publique par les meurtres et agressions à caractère raciste ou sécuritaire.
8) La constitution d’un groupe de travail composé de familles, des jeunes et des associations, d’avocats et de magistrats pour : élaborer des propositions d’actions et de réflexions à destination des pouvoirs publics, tant au niveau local que national (prévention, aide aux victimes, refonte totale de l’I.G.P.N, nouvelles mesures législatives ….)
9) Le suivi judiciaire des différentes affaires restituées dans leur contexte et le climat général dans lequel se déroulent les exactions racistes ou les crimes sécuritaires.
10) Lancement d’un débat démocratique portant aussi bien sur la faiblesse de la judiciarisation des violences policières, ou celles commises en détention, que sur les responsabilités politiques, morales et hiérarchiques à l’origine des impunités des parquets et des auteurs de ces mêmes violences.
Association des Victimes des Crimes Sécuritaires, Lyon United Families & Friends Campagne, Londres
Association Idir Espoir et Solidarité / Vérité et Justice pour Joail / Justice pour Mehdi Bouhouta / Justice pour Mohamed Benmouna
Collectif Justice pour Allan Lambin / Justice pour Sofiane Mostafaoui
Vérité et Justice pour Mehdi Reziga